Le désapprentissage organisationnel : facteur ou résultat de l'innovation inverse

Toute forme d'apprentissage au sein de l'organisation résulte d'un construit représenté sous forme de routines, de procédures, permettant à l'entreprise d'acquérir des connaissances et des pratiques répondant aux finalités commerciales de celle-ci. Le desapprentissage organisationnel est le résultat soit d'un construit permettant d'oublier les acquis par la mise en place de nouvelles connaissances, nouvelles pratiques, soit une perte d'habitude par l'instauration voulue ou subie de pratiques et modes de fonctionnement différenciés. C'est sur l'aspect involontaire que porte cette communication, étudiant l'impact de l'innovation sur les modes de fonctionnement de l'organisation pouvant initier ou influencer les processus organisationnels tacites. Pour les auteurs sensibles à l'approche cognitive de l'organisation (Cyert & March 1963; Nonaka 1994) l'apprentissage est perçu comme une route permettant une finalité commerciale. L'innovation inverse, s'appuie sur un marché dont le moteur constitue ce que Prahalad (2002) appelle la base de la pyramide, c'est à dire la majorité de la population des peuples en voies de développement dont la rémunération moyenne se situe sous la barre des 4 $ / jour. La logique de ce type d'innovation ne se situe plus dans l'apprentissage des modes d'accès de marchés de plus en plus techniques, technologiques et sophistiqués mais dans la réduction de ces caractéristiques, favorisant la fonctionnalité, la simplicité, l'accès et la diffusion. Elle se situe dans une optique de confrontation culturelle, bouscule le construit, impose une remise en cause des acquis et des routines, sources de questionnement, prémisses d'un nouvel apprentissage contrôlé. Les modalités d'organisations, historiquement centralisées, approfondies et technologiques sont remis en cause, considérant que le produit n'est plus l'objectif, celui-ci se décrétant dans la finalité d'utilisation. Les entreprises souhaitant mettre en œuvre une politique d'innovation inverse doivent s'attendre à revoir les routines classiques d'apprentissage, issues ou diffusées dans la culture d'entreprise, soit par confrontation et remise en cause des acquis par les nouvelles équipes issues des pays émergeants, soit par l'intégration des cultures au sein de leur groupe de R&D. Le désapprentissage ou la remise en cause des acquis et pratiques se veut plutôt passif, voire défensif, dans le premier cas et actif, perméable dans le second. Il est inhérent à l'innovation inverse, car résultant du choc de cultures pour lequel les divergences impliquent un désapprentissage, individuel et collectif, préalable à une construction commune.