Le jugement porté sur les déficiences d’expression écrite dans les CV : une expérimentation auprès de futurs candidats

Les déficiences orthographiques sont répandues dans les organisations et engendrent des coûts importants. Les compétences de communication écrites sont pourtant considérées comme importantes pour les recruteurs. Le recours au dossier de candidature étant massif en France, ces compétences sont évaluées dès la phase de présélection. Si les perceptions des recruteurs sont négatives face aux fautes d'orthographe, Charney et al. (1992) ont montré que les recruteurs et les étudiants n'ont pas les mêmes perceptions : les étudiants y accordent moins d'importance que les recruteurs. Il existe très peu de travaux sur la place l'orthographe dans le recrutement en France. Nous souhaitons donc répondre à la question suivante : les candidats privilégient-ils le « fond » (l'expérience professionnelle) ou la « forme » (le niveau d'orthographe) lorsqu'ils jugent de la qualité d'un dossier de candidature ?Nous avons mené une expérimentation auprès d'un échantillon de 265 étudiants en filières professionnalisantes. 87,2% des sujets ont réalisé au moins un stage ; 37,2% exercent ou ont exercé un emploi (hors emploi saisonnier); 98,8% ont déjà présenté des candidatures pour un emploi ou un stage. Nous les avons considéré comme de futurs candidats car ils sont destinés à entrer sur le marché du travail à court terme (dès la fin de l'année universitaire). Les sujets ont classé et noté 6 dossiers de candidature. Notre matériel se compose de 6 dossiers de candidature homogénéisés et différant uniquement en termes d'expérience et de fautes. Notre design expérimental est mixte, avec 2 facteurs intra sujets (l'expérience et les fautes) et un facteur inter-sujets (le niveau d'orthographe des candidats). Les candidats ont ensuite rempli un questionnaire sur la justice perçue du critère de recrutement, adapté de l'outil de Steiner & Gilliland (1996).Nous avons constaté que les candidats jugeaient plus sévèrement les dossiers de candidature comportant des fautes que ceux sans faute, toutes choses égales par ailleurs. Contrairement aux conclusions de Charney et al. (1992), les dossiers des candidats expérimentés et faisant des fautes étaient significativement moins bien notés que ceux du candidat sans expérience et ne faisant pas de fautes (t(163) = 7,54 ; p