Le temps des territoires de l'action publique : l'exemple de la santé mentale

L'organisation des soins en psychiatrie et les débats qu'elle suscite ont, en France, une longue histoire. Largement basée sur la volonté de désinstitutionaliser les malades mentaux, le fil directeur de cette organisation est l'identification et la définition du territoire pertinent. Une première fausse idée consiste à penser que ce mouvement oppose l'intra à l'extra hospitalier. Les soins hospitaliers symboliseraient une forme de prise en charge aujourd'hui dépassée car héritée de l'histoire asilaire, alors que les soins ambulatoires devraient être développés au nom des vertus supposées de la proximité. Pourtant, au moins depuis la mise en place de la " sectorisation " dans les années 1960, c'est bien la complémentarité et la pluridisciplinarité qu'il s'agit de concrétiser au sein d'une politique que l'on voudrait homogène sur tout le territoire national. Certes, les études, rapports, plans, mettent en évidence une grande diversité des situations selon les secteurs. Mais cet article montre que cette diversité n'est pas, en elle-même, signe de dysfonctionnement. Au contraire, la dynamique à l'œuvre semble s'ouvrir sur une économie politique de la santé mentale dans laquelle le territoire et ses acteurs ne seraient plus le réceptacle de l'action publique, mais son protagoniste.