La ville durable en question

Si aujourd'hui plus de la moitié de la population mondiale vit dans les villes, elles sont aussi responsables de plus des deux tiers des émissions de CO2 de la planète, de la pollution de l'air, du sol et des rivières ainsi que d'une ségrégation socio-spatiale. Cette sensibilité aux enjeux du développement durable a impulsé une dynamique d'innovations nouvelle portée principalement par les élus des villes. C'est précisément cette dynamique d'innovations que nous souhaitons interroger dans la présente communication. Dans quelle mesure ces innovations sont elles tributaires du concept de développement durable hérité du rapport Bruntland de 1987 ? En quoi le fait de repenser le concept de développement durable peut-il renouveler la réflexion sur la ville durable ? Pour ce faire, nous montrerons dans un premier temps que le concept de ville durable est une parfaite transposition du concept de développement durable vulgarisé par le rapport Bruntland au champs de l'urbain. Nous verrons que cette transposition a donné lieu à des mises en œuvre variées pour des raisons qui tiennent autant aux spécificités inhérentes à chaque ville qu'à une appropriation différenciée du concept de développement durable par les acteurs en charge de la fabrique de la ville durable. Dans un deuxième temps, partant de la controverse sur le développement durable largement nourrie par les partisans de la décroissance (Bourg, 2010) nous nous interrogerons alors sur la nécessité de déconstruire, ou pour le dire autrement repenser, le concept de développement durable et, ce faisant, celui de ville durable. A cette fin, nous analyserons, dans le sillage de M. Lussault (2009), comment l'entrée dans le développement durable via la question de la vulnérabilité conduit à penser que la question première n'est pas celle de la conservation/économie de ressources mais celle de s'interroger sur ce qui fonde notre existence et, partant de là, sur les risques que nous sommes prêts à prendre et à assumer. De la sorte, nous verrons que la question du développement durable considérée à travers le prisme de la vulnérabilité comporte, parce qu'elle met l'accent sur notre capacité à exister et notre dynamique d'évolution, une dimension historique, philosophique et politique qu'il n'est pas possible d'éliminer.