Interrogations sur la pertinence de la mesure des inégalités par l’indice de Gini, le cas du Brésil

Avec un indice de Gini atteignant 0,52 en 2016, le Brésil se situe aujourd'hui parmi les dix pays les plus inégalitaires au monde. Le niveau des inégalités n'a quasiment pas cessé d'augmenter dans ce pays des années 1970 jusqu'à la décennie 1990, mais la particularité est que l'évolution de cet indice y est caractérisée par une courbe décroissante depuis le milieu des années 1990, passant de 0,60 en 1995 à 0,52 en 2016. Nous nous interrogerons cependant sur la capacité de cet indice à mesurer rigoureusement le niveau des inégalités. Notamment, nous essaierons de mieux comprendre ce qui oppose aujourd'hui l'analyse de la distribution personnelle des revenus, caractérisée par le Gini, et l'analyse fonctionnelle, reposant sur l'étude du partage profits/salaires, cette dernière ayant plutôt tendance à révéler une stagnation des inégalités alors que la première montre une baisse constante de celles-ci depuis le milieu de la décennie 1990. Surtout, il est indispensable de constater que les revenus pris en compte dans la mesure de l'indice de Gini sont souvent sous-estimés pour les couches les plus aisées de la population, et ce d'autant plus dans un pays comme le Brésil où la part des revenus en provenance du secteur financier atteint des niveaux importants. Il s'agira de montrer finalement que malgré tous ces biais, l'indice de Gini reste un indicateur fiable pour évaluer l'évolution des inégalités de revenus au Brésil. Nous nous pencherons davantage ensuite sur l'évolution des revenus des différents déciles de la population, des plus pauvres aux plus riches, afin de présenter une analyse plus fine de la situation socio-économique de ce pays et de son cheminement vers une société plus égalitaire. Nous montrerons que l'essor d'une vaste classe moyenne, reposant en grande partie sur une forte augmentation de la demande de travail non qualifié, modifie substantiellement la société brésilienne.