Quels déterminants des stratégies logistiques des commerces alimentaires en ville ? Une approche méthodologique par la diversité urbaine et commerciale

Dans une agglomération, l'approvisionnement du commerce de détail représente un tiers des livraisons et des enlèvements (Gerardin et al., 2000). Les flux générés ont pour corollaire des externalités négatives liées à l'émission de gaz à effet de serre et à la congestion (Savy, 2007). Ils gagneraient ainsi à être optimisés, notamment par la mutualisation de flux aux caractéristiques similaires ou par l'introduction de nouveaux points de rupture de charge. Pour cela, il est important de comprendre les déterminants, à la fois urbain et commercial, des organisations logistiques. À ce titre, cette recherche s'intéresse au commerce alimentaire dont les mutations récentes laissent entrevoir une recomposition spatiale et structurelle des flux logistiques : nouvelles centralités commerciales au profit de la zone dense (Capo, Chanut, 2012 ; Moati, 2016), réduction des intermédiaires (Chiffoleau, Prévost, 2012) et de la distance (Praly et al., 2014) dans la chaîne d'approvisionnement. S'appuyant sur l'Enquête Transport de Marchandises en Ville (TMV), qui quantifie les flux de transport de marchandises dans une agglomération via les établissements commerciaux qui les génèrent, elle met en évidence la nécessité d'intégrer la diversité urbaine et commerciale dans l'analyse logistique, dans le but d'identifier les variabilités des flux logistiques dans les villes. Toutes les villes génèrent-elles les mêmes flux logistiques, dont seul le nombre total varierait selon la taille des villes ? Ou la variation est-elle moins quantitative, en fonction de la taille des villes, que qualitative, en fonction de leurs caractéristiques ? Ainsi, quel rôle jouent les caractéristiques urbaines sur la logistique des commerces alimentaires ? En se focalisant sur l'offre commerciale, l'objet de cette communication est de renouveler l'approche pour analyser la logistique des commerces des villes. La méthode consiste, dans un premier temps, à identifier des catégories de commerces à la logistique différenciée en s'appuyant sur la littérature relative aux déterminants logistiques en géographie du commerce et en sciences de gestion. En ce sens, notre approche se différencie de l'enquête TMV, qui suppose que les commerces relevant d'un même secteur d'activité (Nomenclature d'Activité Française de l'INSEE) et aux effectifs semblables ont une logistique similaire. Trois unités urbaines de la région Hauts-de-France (Douai-Lens, Dunkerque et Valenciennes) ont été sélectionnées pour tester la pertinence des catégories établies. Pour ce faire, en s'appuyant sur le répertoire SIRENE de l'INSEE, sont déterminées trois variables : leur localisation, leur stratégie commerciale et leur appartenance (ou non) à un réseau. Six catégories de commerce à la logistique différenciée sont proposées. L'originalité réside dans la prise en compte de cette dernière variable, dans la mesure où elle permet de distinguer les commerces responsables de leur logistique de ceux qui la délèguent, intégralement ou partiellement, à une tête de réseau. Les premières analyses du poids de ces catégories dans les unités urbaines mettent en évidence des variabilités d'une unité urbaine à l'autre, impliquant ainsi des pratiques logistiques différentes en termes de zones réceptrices des flux, de plateforme émettrice (centrale d'achat, grossiste, etc.) et de mode d'organisation du transport (trace directe, tournée). Ces variabilités questionnent les caractéristiques urbaines influençant le tissu commercial et la logistique.