Éditorial

Depuis la rédaction de la Charte de la diversité en 2004, signée par plus de 3500 entreprises. et visant au départ à prévenir la discrimination à l'emploi, la notion de diversité s'est élargie et connaît de multiples déclinaisons. Aussi avons-nous souhaité dans ce numéro 23 de Management et Sciences sociales apporter quelques éclairages en croisant des points de vue : les témoignages des gestionnaires d'entre-prise s'enrichissent des réflexions des chercheurs tandis que la réflexion des chercheurs éclaire les actions menées sur le terrain. Les articles rassemblés dans ce dossier sont pour la plupart issus d'une sélection de contributions présentées aux 12èmes rencontres internationales de la diversité, qui se sont déroulées à La Rochelle les 29 et 30 septembre 2016. Le premier article, signé par Annie Cornet, Christine Tomat et Aysel Uzen, porte sur l'articula-tion entre la diversité du personnel et la diversité des usages dans le milieu hospitalier. Cette recherche vise à décrire les différentes composantes de l'indispensable métier de médiateur qui s'inscrit dans des procédures d'égalité et d'inclusion sociale, de recherche de plus d'efficacité et d'efficience. Dans le deuxième article, Gaëlle Redon et Leila Loussaief étudient la façon dont les grandes écoles françaises se sont approprié la thématique de la diversité et dont elles orientent leur discours sur la question. En traitant des défis de la surdouance et de la richesse de la diversité intellectuelle, Philippe Mouillot, Dominic Drillon et Clotilde Beylouneh apportent un témoignage sévère sur l'absence de reconnaissance par les mondes académique et professionnel de la diversité de l'intelligence et du potentiel qu'elle représente. Ils proposent un test d'intelligence susceptible de faciliter la diver-sité, l'intégration, l'épanouissement d'adultes surdoués dans la vie économique de demain. Éric Vernier et Hodonou Dannon étudient la relation entre la diversité – notamment la présence de femmes ou d'administrateurs indépendants-dans le conseil d'administration de 3 grands groupes bancaires et la politique de distribution des dividendes. Les résultats obtenus confirment l'hypothèse de lissage des dividendes et indiquent que des baisses de dividendes sont rarement observées dans de grands groupes bancaires. Pour clore ce dossier, un essai de Maria Giuseppina Bruna, Luc Frédéric Ducray et Nathalie Montargot met en lumière une synthèse des ambivalences et ambiguïtés qui appellent à repenser le management des équipes. Par-delà la diversité dans son acception traditionnelle, les auteurs font appel au concept de super-diversité pour inviter à bâtir un management d'entreprise inclusif à même de reconnaître la singularité de chaque collaborateur. Si un tel projet reste un défi face au flot de normes et référentiels parfois contradictoires, un besoin nouveau d'affiliation sociale apparaît, avec la quête de nouveaux réceptacles du vivre-ensemble, compatibles avec l'individualisation liquide qui est à l'oeuvre. Trois varia complètent ce numéro. En analysant la façon dont les salariés français, hommes et femmes, utilisent leurs liens professionnels pour développer leur employabilité et mettre en oeuvre leurs stratégies de carrière, Dominique Baruel Bencherqui, Anne Janand et Mohamed Karim Kefi montrent que les hommes préfèrent développer leur employabilité interne en s'appuyant sur des réseaux intra-organisation-nels instrumentaux tandis que les femmes choisissent de développer leur employabilité externe, avec leurs propres réseaux inter-organisationnels instrumentaux. Les auteurs préconisent alors pour les entreprises une démarche stratégique favorisant le réseautage sans distinction de genre et encourageant la construction de communautés de carrières. Baptiste Rappin met en évidence l'influence de la logique moderne sur la cybernétique, et, de là, son importation presque clandestine dans les sciences de gestion. Pour l'auteur, la filiation cybernétique du management contemporain ouvre un immense champ de recherche en permettant de réintégrer le management dans l'histoire des idées, métaphysique, politique et scientifique. Il attire également notre attention sur les insuffisances du management contemporain et, plus précisément, sur sa nature profondément abstraite. Utilisant une approche qualitative exploratoire reposant sur des entretiens semi-directifs, Jean Pierre Dumazert, Salomée Ruel et Faniry Moreau présentent leur étude sur la notion de mieux-être au travail dans un contexte de logique collaborative en grande distribution. Ils en concluent que, si d'un point de vue strictement technique, la compréhension profonde de leur rôle par les managers de rayon ne s'impose pas, elle est en revanche indispensable pour permettre un mieux-être et une meilleure présence au travail.